Prochainement se tiendra le sommet sur le climat à Copenhague. A cette occasion, je publie ci-dessous -modeste contribution au débat !- mon intervention faite le lundi 23 décembre au conseil de Paris, sur le « développement durable ».
Monsieur le Maire,
Le développement durable serait une préoccupation nouvelle et prise en compte par tous. Or il nous semble, à nous, élus du Mouvement républicain et citoyen, que les choses sont plus complexes que cette apparence.
De tous temps, lorsque les gouvernements étaient responsables, ils préparaient l’avenir de leur pays. Cela va des forêts plantées sous le règne de Louis XIV au programme du conseil national de la Résistance qui reconstruisait l’avenir de la France à travers des actions publiques appuyées sur des services et un secteur publics forts, sur l’organisation de la recherche, sur le développement des transports ferroviaires, pour le fret comme pour les voyageurs, par la création de la SNCF. Et on pourrait multiplier les exemples.
Mais les « décideurs » ne sont pas toujours aussi responsables et l’appât du gain, bref les profits financiers de quelques uns ont souvent pris le pas sur un développement maîtrisé profitant à l’ensemble de la population.
Car dans « développement durable » chacun des deux termes a un sens et une valeur. Chacun des deux termes est un choix de société.
Ce sujet est souvent médiatiquement abordé à travers la question du climat, de la préservation de la couche d’ozone, du pillage des ressources naturelles.
De conférences en sommets et en protocoles, de Rio à Kyoto ou Poznan et dans le cadre de la préparation de Copenhague, il apparaît clairement que le poids et l’action des Etats-Unis et de la Chine seront déterminants. Cela est révélateur de deux difficultés : la volonté ou non de s’opposer au profit-roi, la possibilité ou non des pays en voie de développement de choisir un système respectueux de l’environnement qui soit, en même temps, facteur de progrès.
Il n’en reste pas moins que nous avons notre rôle à jouer. Notre pays a un rôle à tenir ; je ne cache pas mon scepticisme sur la manière dont il le fera, ne serait-ce qu’en référence au Grenelle de l’Environnement dont la mise en œuvre est d’une étonnante lenteur. Ne parlons pas de son refus d’appuyer la Ville te la Région pour la mise en œuvre de projet aussi significatis en matière d’environnement que le tramway ou le développement des transports collectifs en Ile-de-France. Je suis réservée également quant à l’impact de sa mise en oeuvre sur les couches populaires et je me contenterai d’évoquer le mécanisme de la taxe carbonne.
Le principe 11 de la Conférence de Rio soulignait que, je cite, «Les normes appliquées par certains pays peuvent ne pas convenir à d’autres pays, en particulier à des pays en développement, et leur imposer un coût économique et social injustifié. » J’ajouterai donc qu’en interne un pays ne peut imposer à sa population un même coût économique et social injustifié.
Cela ne doit en rien servir d’alibi à l’immobilité. Et Paris n’est pas immobile, Paris agit, Paris est même exemplaire. Car Paris promeut l’idée d’un développement qui réduit la pression sur l’environnement en même temps que les inégalités sociales. Que fait Paris ?
50% des émissions de gaz à effet de serre à Paris sont conséquences des transports ? Eh bien, depuis 2001 Paris invente une nouvelle politique des déplacements.
- D’abord des transports publics : c’est la réalisation du Tramway des Maréchaux lors de la précédente mandature, ce sera sa prolongation jusqu’à la Porte de la Chapelle en 2012 ; c’est, en lien avec le STIF qu’il finance à 30%, la question des réseaux bus et métro : je pense entre autres à l’amélioration indispensable et urgente de la ligne 13, au prolongement de la ligne 14 et d’Eole, à l’extension du programme Mobilien et à l’accroissement de l’offre de bus, particulièrement en banlieue, car Paris n’est pas une Ville égoïste et repliée sur elle-même. Je souligne d’ailleurs dans le même ordre d’idées, dans le cadre de la démarche Paris-Métropole la nécessité de l’augmentation de transports publics banlieue-banlieue qui serait favorable à Paris en participant à la décongestion de ses transports en commun comme de sa circulation automobile.
- Ensuite le développement des circulations douces. Inutile de revenir sur le succès de Vélib’, sur les espaces civilisés ou piétonniers, sur le réseau cyclable, si ce n’est pour souligner la baisse de 32 % de la pollution et de 9% des émissions de gaz à effet de serre en 5 années lors de la dernière mandature.
- Notre municipalité agit également de manière multiforme en ce qui concerne la circulation automobile. Outre le fait d’agir pour que le recours automobile ne soit pas systématique, elle va mettre prochainement en place Autolib’ dont les tarifs devraient être compétitifs par rapport à la possession d’un véhicule individuel. Vous savez également, Monsieur le Maire, combien nous sommes attachés à ce que des industries automobiles installées en France puissent répondre à l’appel d’offre. Non seulement parce que nous sommes très préoccupés par la défense de l’emploi mais aussi parce que le bilan carbonne d’une voiture fabriquée en France n’est par comparable à celui d’une voiture fabriquée et importée de Corée !
Après la question des transports, celle de l’énergie. La question de l’épuisement des énergies fossiles, comme celle de l’indépendance énergétique est à l’ordre du jour. Vous le savez nous ne sommes pas, contrairement à nos amis verts pour l’arrêt brutal des centrales nucléaires. D’abord parce que nous croyons que le progrès scientifique se maîtrise, ensuite parce que nous remarquons que l’indépendance énergétique de la France est un facteur d’indépendance tout court, et qu’il n’y a pas de démocratie sans indépendance. D’autres pays n’ont pas fait ce choix : ils nous achètent aujourd’hui notre électricité, plus propre que celle issue du charbon ou du pétrole. Cependant, je l’affirme, cela doit cesser de s’opposer au développement d’autres formes d’énergie, et principalement des énergies renouvelables.
Quant à notre Ville, dans son domaine de compétence, elle aborde cette question par les deux bouts : celui des sources d’énergies comme celui des économies.
-les sources d’énergie dites propres sont diverses :
*le solaire : les bailleurs sociaux ont déjà installés 4000 m² de panneaux ; ils en ont 9000 en projet. 25 000 sont étudiés sur les bâtiments municipaux. Les éco-quartiers sont mobilisés : 3500 m² de prévus à Pajol et 40 000 m² à Clichy-Batignolles.
*la géothermie en lien avec la CPCU permettra le chauffage de 12 000 logements dans le 19ème et des études sont en cours sur la ZAC Clichy-Batignoles
* notons également l’utilisation des eaux usées ou le développement du recours à la méthanisation et la valorisation des boues.
-et puis la chasse au gaspi !
*La Ville s’occupe d’abord de son patrimoine avec des diagnostics sur l’ensemble de ses bâtiments. Cette démarche sur l’Hôtel de Ville a permis une baisse de 14% de la consommation d’énergie : on imagine le résultat lorsque l’ensemble des 3000 bâtiments auront été couverts.
*La rénovation de l’habitat est aussi un axe central de la réduction de la consommation : de la mobilisation des bailleurs sociaux à l’aide à la rénovation des immeubles privés en particulier pour les propriétaires modestes, de nombreuses pistes sont explorées, de nombreuses actions ont déjà été entreprises.
* Citons également l’éclairage public où l’action menée par l’équipe municipale depuis 2001, a permis une réduction de 8% de la consommation, l’objectif étant d’arriver d’ici 2020 à une baisse de 30% des consommations, comme nous nous y sommes engagés dans le Plan Climat.
Se soucier du développement durable c’est aussi se soucier des personnes, de leur cadre de vie et de travail.
-le cadre de vie des Parisiens,
* c’est la biodiversité en milieu urbain : l’effort de végétalisation des toitures et des façades est considérable, il contribue par ailleurs à l’isolation et limite l’impact ces changements climatiques
* c’est la création d’ « Eau de Paris » -et je veux saluer sur cette question le travail remarquable d’Anne Le Strat- permettra de rendre la gestion de cette ressource essentielle à la fois plus écologique et plus solidaire : seul le service public de l’eau peut se fixer pour but de préserver la qualité de l’eau à un coût abordable pour l’usager.
* c’est l’attention portée à une moindre production de déchet et à leur élimination avec une ambition de réduire les déchets de 15% en 2020 s’appuyant sur une baisse actuelle en cinq ans de 8%.
* c’est aussi le développement de l’alimentation bio. La Ville agit dans le domaine scolaire et aide la Région à convertir des terres agricoles franciliennes au bio. Il ne faut cependant pas se cacher que cette qualité alimentaire n’est pas, pour l’instant, accessible à tous.
* c’est la volonté d’améliorer la qualité de l’air intérieur (avec le Laboratoire d’Hygiène de la ville de Paris, des études sont menées dans 28 crèches et vont être menées dans une trentaine d’écoles) et extérieur (financement d’études sur les particules fines et travail avec la Préfecture de Police).
* c’est, enfin la lutte contre les nuissances sonores : de l’isolation à l’aménagement de l’espace, la municipalité vers un plan de prévention du bruit.
-le souci de l’emploi ensuite, car, oui l’emploi est un des axes du développement durable ; ce secteur est porteur de diverses formes d’activités.
* des emplois sans qualification mais qui remettent les gens dans le circuit du travail et participent à l’insertion professionnelle et sociale : ressourceries, tri des déchets, recyclage d’objets par exemple, et tout ce qui tourne autour de l’économie sociale et solidaire,
* des emplois liés à la nécessité d’adapter notre habitat : je pense entre autres à l’aide qu’apporte la Ville aux métiers du bâtiments,
* enfin des emplois d’avenir innovants ; je me réjouis donc du soutien de Paris au futur Instituts des métropoles durables, au projet Innov’eco ou à Durapôle.
Enfin, vous l’avez compris, notre souci est grand que les justes préoccupations écologistes n’oublient pas les difficultés de nos concitoyens qui subissent la crise.
Aussi ai-je été particulièrement attentive au fait que vous soulignez, Monsieur le Maire, que « les principes fondateurs de l’action municipale constituent une signature politique qui ne dissocie à aucun moment les enjeux environnementaux des enjeux sociaux ».
Il faut bien noter que les plus défavorisés sont les premiers atteints par les effets néfastes de la dégradation de l’environnement mais, qu’en même temps, ils sont souvent dans l’incapacité financière de participer à la lutte contre celle-ci.
La Ville a parfaitement pris en compte cette réalité en mettant en place différentes aides telles que l’augmentation de 21% par rapport à 20087 du Fonds de solidarité Logement pour ce qui concerne le volet énergie, des dispositifs de solidarité pour le paiement des factures d’énergie, l’aide Paris-Energie-Familles dont le coût s’élève annuellement à 7M€ mais qui concerne 30 000 ménages.
J’en terminerai là, Monsieur le Maire, en saluant les efforts, réalisations et prises en compte par notre Municipalité des divers aspects d’une politique de développement durable qui prépare l’avenir sans exclure les plus démunis du présent, sans augmenter les difficultés de la masse de nos concitoyens qui subissent déjà une crise dont la fin ne se profile guère à l’horizon contrairement aux déclarations gouvernementales.
Notre conception n’est pas celle d’un sacralisation de la planète mais d’une optimisation par l’Homme de son environnement afin qu’il la préserve et en préserve les ressources pour son propre bien être.
Bref, nous nous retrouvons parfaitement dans le 1er principe édicté par la Conférence de Rio : « Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable. » Paris et sa municipalité ne l’oublient pas et c’est bien.