J’ai choisi de publier ci-dessous mon intervention au Conseil de Paris du 20 octobre 2008 dans le cadre du débat sur les orientations budgétaires. Car tout débat budgétaire ne peut aujourd’hui se faire hors du contexte de la crise financière mondiale.
Monsieur le Maire, Mes chers collègues,
Nous débattons aujourd’hui des premières orientations budgétaires du mandat et je me réjouis qu’elles se situent dans le prolongement et l’amplification de ce qu’a réalisé notre municipalité depuis 7 ans.
Je veux tout de suite dire que mes propos ne sauraient faire abstraction de la crise que nous traversons. Cette crise sera profonde et durable. Elle est à la mesure des déséquilibres entre l’économie réelle et la sphère financière. Dans un contexte de globalisation, elle trouve son origine aux Etats-Unis qui vivent au-dessus de leurs moyens : leur dette représente 316 % du PIB, ils captent 80 % de l’épargne mondiale ; mais la vague submerge l’ensemble du monde.
A travers de nombreuses annonces médiatisées, les gouvernements d’Europe et d’Amérique veulent donner l’impression de prendre le problème à bras le corps. Ils annoncent la découverte d’une panacée : la recapitalisation des banques qu’ils ont privatisées. Or cette solution ne signifie qu’une chose : faire payer les pertes par tous, salariés et retraités en premier lieu, pour le plus grand profit des spéculateurs imprudents et irresponsables. Ce n’est pas au chevet de l’emploi qu’ils viennent apporter remède mais bien à celui de la finance ! Les Français ont payé hier, pour le crédit Lyonnais, ils paieront demain, pour tous les spéculateurs !
Le Président Sarkozy et son premier ministre n’ont de cesse de réclamer l’Unité Nationale face à la crise. Mais pour être audibles encore faudrait-il qu’ils axent leurs discours autour d’une vision consensuelle des intérêts de notre Pays et de la justice sociale.
Quand la situation le permettait, le gouvernement a choisi de privilégier les riches. Quand la Bourse allait bien mais que le pouvoir d’achat de nos concitoyens ne cessait de diminuer, il a mis en place le bouclier fiscal au lieu d’augmenter le SMIC et le point d’indice ! Il a démantelé nos solidarités nationales, à commencer par nos services publics, y compris celui de la santé et de la protection sociale. Il a reporté sur les collectivités territoriales les charges de cette solidarité. C’est aujourd’hui le cas du RMI qui coûte à notre ville pas moins de 108 millions d’euros. Demain ce sera certainement le cas du RSA !
Que fait-il aujourd’hui quand la Bourse s’effondre du fait de l’insouciance et du cynisme de ceux qui s’enrichissent en dormant? Remet-il en cause ce choix ? Bien sûr que non ! Alors que des milliers de personnes risquent de se retrouver au chômage, de voir leurs économies, parfois de toute une vie, s’envoler, que le pouvoir d’achat continue de dégringoler, il persiste et signe jusqu’au changement de statut de La Poste !
La Mairie de Paris ne peut dans ce contexte rester les bras croisés : elle ne le fait pas, comme elle ne le faisait pas avant la crise !
Avant la crise, la Ville a assumé les carences de l’Etat en matière sociale : alors que l’Etat stigmatisait le chômeur, rendait plus difficile l’indemnisation, et pressurisait, ainsi, l’ensemble des salaires, que faisait la Ville ?
Eh bien ! La Ville en 2007 a permis à 1 700 allocataires du RMI d’être resocialisés. Ils ont été formés et ont retrouvé un emploi, grâce aux structures d’insertion. Dans la dernière mandature, ce n’est pas moins de 8 500 emplois qu’elle a créés. Ce ne sont pas moins de 30 000 logements sociaux qui ont été financés.
80% des immeubles ont été ou sont en voie d’être sortis de l’insalubrité. L’enveloppe d’acquisition pour le logement a été multipliée par 4. 8 000 logements ont été sauvés de la vente « à la découpe ». Ajoutons à cela la mise en place du prêt « Paris logement zéro % » et du micro crédit et on voit bien de quel côté se trouve l’innovation et la compétence !
Ce que la Ville a fait avant la crise, malgré les difficultés la Ville s’organise pour l’accentuer avec d’autant plus de détermination, que les Parisiennes et les Parisiens, en subiront les effets au vu de l’importance, pour notre Ville, du tourisme et de notre tissu économique qui vont être touchés par la crise.
Ce n’est donc pas moins de 400 millions d’euros qui seront consacrés au logement : 6 600 logements supplémentaires seront financés avec un objectif de 40 000 logements supplémentaires pour cette nouvelle mandature.
De plus, la crise actuelle, pourrait bientôt se doubler d’un crash immobilier. Alors que l’Etat semble attendre son salut de l’au-delà, la Ville prend les devants : pour un montant de 20 millions d’euros le dispositif « Paris logement 0% » sera complété d’un Prêt Parcours Résidentiel pour permettre à des locataires du parc social d’en sortir. Une aide sera créée pour inciter les propriétaires à entrer dans le dispositif « Garantie des risques locatifs ».
Celui-ci supprime la barrière de la caution, et permet la mutualisation des risques afin de rendre le logement plus accessible.
Enfin, d’ici 2010, 21 millions d’euros, permettront de terminer notre programme de rénovation des immeubles insalubres. Le groupe MRC se réjouit de la mise en place d’un dispositif de veille pour éviter que cet état de fait ne recommence. Dommage que la droite n’y ait même pas songé lorsqu’elle dirigeait notre Ville ! Cela nous aurait permis des économies substantielles ! Mais, il est vrai, que cette préoccupation n’est pas la sienne, tant au niveau parisien, qu’au niveau national.
La Ville assume les carences de l’Etat en matière de santé : alors que l’Etat n’a de cesse de s’attaquer au système solidaire de sécurité sociale par une politique de franchises médicales et de déremboursement, par la fermeture d’hôpitaux publics et de lits comme le dénonce fort justement le livre blanc de l’Association des Petites Villes de France, que fait la Ville ?
26 millions d’€ seront consacrés aux actions de préventions et à un plan « Paris nutrition santé » dans les écoles. Les crédits aux vaccins et aux médicaments seront augmentés et notre politique contre les MST développée.
J’ajouterai à cela que la Ville a également assumé les carences de l’Etat en matière d’investissement et de services publics : alors que l’Etat et l’Europe refusaient toute politique de grands travaux et de relance économique et privatisaient à tour de bras en démantelant les services publics, que faisait la Ville ?
Eh bien la ville a doublé ses investissements : création du Tramway, de terrains de sports, de piscines, elle a investit dans la propreté, elle a permis un essor sans pareil de la culture et du tissu associatif.
Pour entretenir ce rebond, nos investissements augmenteront de 18% pour atteindre 8,5 milliards d’€ à la fin de cette nouvelle mandature et des crédits importants seront consacrés aux PME-PMI.
Concernant les services publics parisiens, la Municipalité a pris l’engagement d’ouvrir 4500 places en crèches ou haltes-garderies. En 2009, 576 places seront ouvertes, avec un budget qui passe de 55 millions à 60 millions d’euros pour le fonctionnement.
Concernant l’Ecole, je ne reviendrai pas sur mes propos au dernier Conseil, mais je souhaite attirer votre attention quant aux rumeurs de nombreuses suppressions de postes pour le RASED liées aux nouvelles directives gouvernementales sur la suppression des cours le samedi matin.
Pour que Paris soit à la hauteur de ces enjeux, nous soutenons totalement l’augmentation de la fiscalité locale, d’ailleurs modérée, prévue et présente dans le programme de mandature.
Bien entendu, les impôts locaux ne sont pas justes. Mais cette injustice est à relativiser.
Tout d’abord la Taxe d’habitation bénéficie à Paris du maximum d’abattement prévu par la loi notamment en ce qui concerne les enfants en charge. De plus son calcul prend en compte le revenu d’imposition. Quant à la taxe foncière que nous étendons au département, force est de constater que les propriétaires parisiens modestes sont de plus en plus rares. Et nous sortons ainsi de l’injustice qui faisait que seuls les locataires participaient à la solidarité départementale.
Mais surtout l’injustice de ces taxes est quasi inexistante face au bouclier fiscal, à la diminution des tranches de l’impôt sur le revenu et la multiplication des niches fiscales. Et nous n’osons même pas parler du projet délirant d’augmentation de la TVA, seul impôt dégressif, que souhaitaient mettre en œuvre le gouvernement et l’Europe avant la crise sous le vocable de « TVA sociale »: lorsque le système d’impôt national progressif est laminé, et que la redistribution s’opère en faveur des capitaux, quelle marge de manœuvre reste-t-il pour exercer la solidarité ? De quelles marges de manoeuvres disposons-nous lorsque ceux qui profitent du détournement de la solidarité nationale font appel aux fonds de tous pour résorber une crise qu’ils ont eux-mêmes engendrée ?
Alors oui ! Avec ces orientations budgétaires, notre ville tiendra ses engagements malgré la crise. Mais notre ville se trouve dans cette circonstance historique une mission supplémentaire à accomplir : celle de la protection de nos concitoyens les plus fragiles socialement, et également, du personnel municipal.
Ce « bouclier social » est préfiguré dans la communication sur les orientations budgétaires.
Pour ne citer que quelques exemples : augmentation de la solidarité intergénérationnelle pour atteindre, en 2009, 293 M€ (soit + 23% depuis 2001), aide sociale à l’enfance (+ 24% soit 10 M d’€) alors que l’Etat se désengage de nos 26 centres sociaux, 279 M€ de crédits (+7%) pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes, + 9% pour l’allocation personnalisée d’autonomie, création d’un nouveau plan local pour l’insertion et l’emploi pour les 10ème, 11ème, 12ème et 20ème arrdts, objectif d’un taux durable de chômage en dessous du taux national, mise en place de l’allocation « Paris logement » pour aider les Parisiens qui consacrent plus de 30% de leurs revenus à leur loyer et à leurs charges, développement de l’insertion professionnelle et de l’économie sociale et solidaire sans oublier le micro-crédit.
Notre groupe a conscience que le document qui nous a été remis concerne les grandes orientations budgétaires et non pas le budget.
Nous avons conscience que les louanges de tous, sur la saine tenue de nos comptes, permet aujourd’hui à notre ville de pouvoir finir sereinement cette année budgétaire ; trop de localités ne peuvent faire face à des dépenses de fin d’année, l’emprunt leur étant difficile voir impossible du fait de la conjoncture.
Mais la notation triple A, si elle nous est aujourd’hui d’une grande utilité pour cette raison, le sera-t-elle demain ? Ne pourrions-nous pas nous interroger sur ce qu’il conviendrait de faire pour permettre un véritable bouclier social et le mesurer au regard des 4 millions d’€ que nous rapporte cette notation?
Nous pensons comme vous, monsieur le Maire, que notre rôle, du fait du désengagement de l’Etat, doit être de protéger nos concitoyens même si nous ne pouvons le remplacer.
Devant la baisse du pouvoir d’achat, et en période de crise, ne pourrait-on pas étudier des mesures de financement pour donner gratuitement accès, en plus de l’amplification de notre politique de logement, au minimum vital en matière d’eau et d’énergie au Parisiennes et aux Parisiens ?
Nous savons que 8 500 emplois ont été créés sous l’ancienne mandature et qu’il s’agit d’un très bon taux vis-à-vis d’autres collectivités. Mais devant l’augmentation du chômage, et sa certaine amplification dans les mois à venir, ne pourrions-nous pas augmenter directement le nombre d’emplois, notamment pour faire fonctionner, à leur pleine efficacité, nos nombreux équipements publics ? Je pense notamment aux espaces verts, aux bibliothèques et à la propreté. Nous avons déposé un vœu à ce sujet.
Ces marges de manœuvres pourraient également être utilisées pour la rémunération du personnel municipal, 52 % de nos agents sont de catégorie C de la FPT avec une rémunération inférieure à 1 250 € par mois. Nous savons bien que l’idéal serait de relever significativement le point d’indice, mais cette décision ne nous appartient pas. Nous pouvons explorer d’autres pistes, en lien avec les représentants du personnel : politique indemnitaire, de promotion et de titularisation.
Nous y gagnerions dans la stabilité de nos personnels ; je pense en particulier aux crèches où le taux de rotation est vertigineux : nous pourrions sans doute récupérer des marges sur la formation du personnel.
Il serait sans doute utile que la municipalité, sous l’impulsion de l’adjointe chargée du secteur et en lien avec les élus, puisse travailler à un plan pluriannuel des RH de la Ville et du département.
Quoiqu’il en soit Monsieur le Maire, comme tous les budgets depuis 2001, les orientations budgétaires pour 2009 font preuve du plus grand sérieux.
Durant notre mandat, nous aurons bien employé l’impôt des Parisiens. Nous l’aurons employé à lutter pour leur emploi et pour leur logement, à répondre à leur besoin de services publics et de qualité de vie, et ce, malgré les embûches que nous tend chaque jour le gouvernement et malgré la crise financière qui touche notre Pays.
Notre adhésion aux grandes orientations budgétaires 2009 est donc forte.
Voilà, Monsieur le Maire, mes chers collègues, la position de mon groupe sur ces solides orientations budgétaires.