MANIFESTATIONS ANTI-HAMAS A GAZA

3 avril 2025 Un article de Philippe Hervé

paru le 30 mars 2025 sur le site du réseau de LA GAUCHE RÉPUBLICAINE, LAÏQUE, ÉCOLOGIQUE ET SOCIALE

L’immense solitude d’un peuple

Ils avancent en cortège au milieu des gravats des immeubles démolis. La procession progresse lentement dans un chaos de ruines. Mille voix crient leur colère contre la guerre, les destructions et le pouvoir qui les opprime, en premier lieu le Hamas. Nous sommes à Beit Lahia, au nord de Gaza. La ville a été littéralement aplatie par l’artillerie israélienne. L’image est saisissante, elle provoque l’empathie. 18 mois de guerre n’empêchent pas le peuple de Gaza de manifester à visage découvert pour exiger la dignité dont il est privé depuis presque vingt ans déjà. La dignité d’un peuple martyrisé, mais en marche.

 « Hamas terroriste ! »

Les slogans sont clairs et sans ambiguïté : « Hamas terroriste ! »« Dehors le Hamas, allez à Téhéran ! »« Libérez les otages ! ». En hurlant ces mots d’ordre, les manifestants mettent leur vie dans la balance. Ils sont filmés par les smartphones, ils ne se cachent pas. Ils savent que les miliciens liquidateurs peuvent les retrouver très facilement. Ils vont même au-devant des caméras pour exprimer leur dégoût des islamistes du Hamas et du Djihad islamique. Dès qu’un micro apparaît, les manifestants parlent, ils comprennent parfaitement la situation dramatique dans laquelle ils survivent. Ce jour-là, le 25 mars, un homme est allé jusqu’à donner son nom à la chaîne américaine CNN : il s’appelle Abu Ziad. Voilà ce qu’il a dit : « Nous sommes opprimés par l’armée d’occupation (israélienne) et nous sommes opprimés par le Hamas ». Puis il a ajouté : « Le Hamas a lancé l’opération du 7 octobre, et aujourd’hui nous en payons le prix ». Il faisait référence aux attaques du groupe islamiste contre Israël en 2023, qui ont fait en deux jours plus de 1 200 morts et qui ont conduit à la guerre. Une lucidité absolue sur les causes du désastre et sur la tenaille qui les enserre.

De la résistance passive à la résistance active 

Depuis le 24 mars, des manifestations se déroulent tous les jours à Beit Lahia, mais aussi à Jabaliya ou encore à Deir Al Balah. Combien sont-ils ? D’après l’agence Associated Press (AP), plusieurs milliers, mais le nombre exact est difficile à estimer.

Est-ce un mouvement d’humeur, une irruption inattendue ? Absolument pas. Depuis des mois le feu couvait, mais personne ne voulait le voir… Nous y reviendrons. Le mouvement anti-islamiste adoptait la forme d’une résistance passive. La preuve éclatante en a été la très faible participation des Gazaouis aux « spectacles » morbides organisés par le Hamas et le Djihad islamique pour la libération des otages israéliens. La foule semblait importante, mais c’était un effet d’optique, une prise de vue à hauteur d’homme des cameramen de l’organisation. Les multiples images des drones au-dessus de ces rassemblements révèlent une présence de quelques centaines de personnes, voire d’un petit millier tout au plus. Une catastrophe pour le Hamas, qui avait pourtant promis la distribution de denrées alimentaires pour tous les participants. Avant la guerre, cette organisation pouvait mobiliser sans problème 100 000 personnes pour un rassemblement dans la ville de Gaza. Mais, début 2025, personne ou presque n’est venu assister à cette exhibition sordide des otages.

Toutefois, ce refus n’était pas suffisant, pratiquement aucun média international ne reprenait l’information de la très faible participation populaire, pourtant vérifiée par les prises de vues droniques irréfutables. Les chaînes de télévision du monde rediffusaient simplement les images biaisées des islamistes.

Alors, la résistance passive s’est transformée en résistance active, pour crier devant les caméras, dans les rues détruites, « Hamas terroriste ! ».

18 ans de terreur à Gaza

Car, depuis juin 2007, le peuple de Gaza sait de quoi il parle, il subit la terreur islamiste au quotidien. Après la liquidation de l’Autorité palestinienne et du Fatah, le Hamas a imposé la Charia aux habitants. La police de cette organisation persécuta tous les opposants réels ou potentiels. Les islamistes firent la chasse aux « déviants », athées, homosexuels, femmes adultères, etc. Les milliards reçus du Qatar ou de la « Charité islamique » des milliardaires des pétromonarchies ne servirent qu’à construire une véritable ville souterraine, des centaines de kilomètres de galeries pour préparer la guerre contre Israël. L’argent permit également de construire une industrie militaire pour produire les missiles envoyés sur « l’ennemi sioniste » pratiquement tous les jours. Bref, rien pour les habitants et tout pour la guerre pour reconquérir Al Aqsa à Jérusalem.

Et la guerre eut effectivement lieu. Autour de leur chef Sinwar, ils furent 5 de la direction intérieure du Hamas à décider de l’attaque du 7 octobre 2023. La stratégie était claire, par sa brutalité, par son inhumanité, l’acte de destruction des kibboutz juste de l’autre côté de la frontière, l’attaque de la ville de Sderot, les massacres et les viols à la fête de Super Nova devait rendre les choses irréversibles. Une haine à mort allait s’imposer entre les deux peuples. Une vision démente, eschatologique, il fallait mourir pour le Djihad. Par cette stratégie de fin du monde, la direction politique du Hamas a précipité Gaza dans une guerre terrible dont la population est la première victime. D’ailleurs, les islamistes ont eu le culot de rédiger un communiqué début 2024 affirmant qu’ils n’étaient en rien responsables du sort de la population civile qu’ils administraient ! Une première mondiale, qui démontre le cynisme à toute épreuve de Sinwar et de son groupe dirigeant. Résultat : après un an et demi, le peuple de Gaza erre dans les ruines !

Mais les Gazaouis antiislamistes sont seuls !

La révolte populaire du 25 mars à Gaza est seule, sans alliés, sans soutiens. Bref, une immense solitude. Car ce soulèvement est hors des cadres et des stéréotypes des prêts à penser des soi-disant « experts du Proche-Orient ». Il ne convient pas aux « discours automatiques » sur la région. Il gêne Netanyahou à Jérusalem, Trump à Washington, Ben Salman à Ryad. En conséquence, un silence médiatique presque parfait s’est organisé pour minimiser autant que possible l’événement. La chaîne de télévision du Qatar Al Jazeera a imposé un strict black-out. D’ailleurs, les manifestants anti-Hamas lançaient des slogans pour dénoncer le boycott médiatique des chaînes du Golfe.

Plus étonnant encore, les médias occidentaux, qui d’habitude relaient la moindre information, vraie ou fausse, sur cette enclave, mirent plus de trois jours à s’apercevoir qu’il se passait quelque chose dans le nord de Gaza. En France, les journaux comme Le Monde minimisèrent l’événement, parlant de « quelques centaines de manifestants qui auraient été vus à Jabaliah »Le Figaro fit de même pendant 72 heures. Car, lorsque l’on est un journal de référence en France, il ne faut surtout pas déplaire ni au Qatar ni à l’Arabie saoudite, les deux très riches nations islamistes.

Un soutien international inexistant 

Il est logique que Trump et Netanyahu, qui ne rêvent que de la déportation du peuple palestinien de Gaza pour construire une paraît-il Riviera de rêve, fassent silence total. Le surgissement anti-islamiste du peuple des ruines n’est pas bon pour leurs projets. En humanisant les habitants de Gaza, la manipulation politique et financière de la « nouvelle Côte d’Azur » prendrait fin. Les ultras réactionnaires Trump, Netanyahou ou Ben Salman sont finalement d’accord sur le fait de bâillonner les peuples. Il n’y a rien à attendre d’eux ou de leurs soutiens.

Mais alors, que font la gauche et la gauche radicale internationale ? En fait, exactement la même chose, elle se tait et regarde ailleurs. Pour la gauche radicale, le Hamas est une organisation antisioniste, donc il faut la soutenir officiellement, ou plus généralement à bas bruit. Depuis 2007, l’état totalitaire du Hamas à Gaza n’a jamais été caractérisé par l’extrême gauche, sous prétexte d’unité anti-impérialiste et antisioniste. Pour les organisations de gauche plus modérées, socialistes ou écologistes, par exemple, le wokisme a fait aussi des ravages. Pour eux, la religion des pauvres, c’est l’islam, et attaquer les organisations islamistes, c’est mettre en danger la religion des pauvres. Donc, ils ne soutiendront pas la révolte de Gaza contre le Hamas.

Que font la gauche israélienne et le mouvement civique contre Netanyahu ?

Alors même que la riposte populaire contre le gouvernement de Netanyahou reprend de la vigueur en Israël, la gauche reste pour le moment sans voix par rapport au mouvement « La paix maintenant » à Gaza. Là aussi, aucune déclaration de solidarité. Il est possible que les choses changent si le mouvement à Gaza se poursuit début avril. Le chef du parti démocrate, Yaïr Golan, qui rassemble aujourd’hui toute la gauche, est interloqué. Il est vrai que le pays est en guerre et qu’il faut être prudent sur ce qui pourrait diviser contre l’ennemi islamiste. L’Israélien de la rue est aussi méfiant envers les Gazaouis, les infiltrations de civils venant de Gaza dans les kibboutzim le 7 octobre pour piller ont laissé des traces dans l’opinion publique. Mais justement, c’est en soutenant les laïques, les anti-islamistes à Gaza que l’on peut trouver une solution de paix.

Seul le peuple de Gaza peut infliger une défaite définitive au Hamas et au Djihad islamique.

Oui, il faut détruire politiquement le Hamas, mais qui peut le faire vraiment ? Seul le peuple de Gaza peut infliger une défaite définitive au Hamas et au Djihad islamique. Tsahal peut défaire militairement ces groupes, mais, politiquement, elle ne le pourra jamais. Ouvrir une perspective de paix, c’est justement tendre la main de l’autre côté de la ligne de feu vers ceux qui crient à Gaza le même slogan qu’à Tel-Aviv : « libérez les otages maintenant ! ».

Le temps presse

Le mouvement va-t-il tenir ? C’est très difficile à estimer. Les trois premiers jours de la révolte, les Frères musulmans agissaient de manière perverse pour faire capoter la mobilisation. Ils tiraient des missiles contre Israël depuis les villes des manifestants, espérant une réplique de Tsahal qui bloquerait les démonstrations de rue. Mais sans grand résultat. Le 27 mars, le Hamas et le Djihad islamique ont changé d’attitude et fait paraître un communiqué commun où ils prétendaient que les manifestants étaient « des agents sionistes qui seront traités comme tels ». Les choses sont claires : les islamistes vont encore une fois tirer sur le peuple.

Sans soutien, le mouvement ne peut que s’éteindre. Pour le sauver, il faut une mobilisation internationale et en Israël… qui peine à venir !

Une autre vision de la guerre ukraino-russe

par Natascha Janssen :
 » Ma mère est née dans l’ex-Union soviétique, en Ukraine, où ma grande famille est un mélange de Russes et d’Ukrainiens. C’est pour cela que je me sens appelée à partager ma vision sur les développements en Ukraine. Avec mes racines russe/ukrainiennes, j’aime beaucoup les deux nations, les nations fraternelles centenaires fusionnant l’une avec l’autre. Quand vous avez demandé à ma mère d’origine ukrainienne si elle se sentait plus russe que ukrainienne, elle a répondu : « C’est une question bizarre à laquelle je n’ai pas de réponse. Il y a une différence dans notre langue, notre musique et notre danse mais nos cœurs ne font qu’un.  » C’est ainsi que j’ai été élevé et passé 40 ans — les plus belles vacances de ma vie — dans l’amour et la complicité, vécus en Russie et en Ukraine, dans l’ex-Union soviétique.
C’est bien que tout le monde s’exprime maintenant contre la guerre. Personne ne soutient la guerre.
Mais pourquoi tout le monde était silencieux quand cette guerre a commencé il y a 11 ans ?
Pourquoi tout le monde n’a-t-il pas réagit sur le massacre de milliers de citoyens dans l’est de l’Ukraine ?
Pourquoi tout le monde n’a pas réagit contre l’Ukraine de ne pas suivre les accords de Minsk ?
Où étaient tous ceux qui regardaient ailleurs quand 52 personnes ont été brûlées vives à Odessa ?
Où étaient tous ceux qui pensaient que c’était bien qu’un gouvernement élu de 2014 soit renversé et qu’un grand pays européen ait été pris en charge par une bande de néonazis ?
Où étaient-ils tous quand le régime ukrainien a enlevé aux Ukrainiens russes leurs droits humains fondamentaux ?
Parler russe a été interdit, le droit aux pensions a disparu pour les ukrainiens russes et les enfants qui parlaient russe et avaient des noms russes et qui n’étaient plus les bienvenus à l’école.
Où était tout le monde quand les rassemblements aux flambeaux étaient organisés par des néo-nazis qui criaient des slogans comme « Russes au gaz » ?
Et enfin, où étaient tous ceux qui se taisaient quand de grandes parties de ce beau pays, autrefois la grange à grains de l’Europe, étaient vendues aux banques et aux investisseurs pour une pomme et un œuf, par exemple l’exploitation pour les manipulations génétiques de Monsanto et le dernier d’Europe méga bio industrie ? Ma nièce en Ukraine a vu une telle ferme usine construite devant sa maison. Les cris incessants de ces animaux serrés si proches les uns et puis ces grands silences assourdissants…
Prenez note : en Ukraine, il n’y avait qu’une seule race de bœuf à petite échelle avant que le pays n’entre en possession du bloc occidental.
L’Ukraine est transformée en vassal de l’Occident depuis 11 ans.
Une colonie. Et tout cela au détriment de l’homme, de l’animal et de la nature.
Alors pourquoi seulement maintenant la compassion du peuple est-elle canalisée dans la rage contre la guerre ?
La population ukrainienne vit en guerre depuis 11 ans.
Des centaines de milliers d’Ukrainiens ont déjà fui en Russie, y compris mes proches, comme ma nièce et sa famille.
Bien sûr, je sais que la plupart des gens n’ont aucune idée de ce côté de l’histoire parce que notre service d’information donne une image très unilatérale de la situation.
Je donne maintenant cette information de l’autre vision.
Fais ce que tu veux, mais le silence n’est plus une option pour moi.
Je ne peux qu’espérer que la paix viendra bientôt pour TOUS les ukrainiens et les russes ! “

L’industrie, un combat pour notre pays.

Une campagne à mener pour le PCF, pour la gauche, pour la France, pour les travailleurs.

https://www.pcf.fr/industrie_combat_pour_pays_et_pour_parti?utm_campaign=communistes_1030&utm_medium=email&utm_source=pcf

Article publié dans CommunisteS, numéro 1030 du 19 février 2025.

Pas de peuple sans Nation

Une très belle intervention de Fabien Roussel :

https://www.youtube.com/watch?v=la4wINOT0Ko

Un texte de Didier LESCHI sur l’immigration

Il est frappant, dès que l’on débat d’immigration, de voir à quel point ceux qui contestent la légitimité du sujet essaient de nous faire accroire qu’il n’y aurait rien de nouveau sous le soleil. Il faudrait penser comme une évidence que l’Europe peut être l’arche de Noé des perdants d’une mondialisation dominée par des États autoritaires ou illibéraux. Qu’elle peut être le refuge de tous ceux qui veulent fuir la faillite des régimes ayant trahi les espérances portées par les révolutions décoloniales. Et que nous pourrions espérer en une société heureuse parce que créolisée, grâce conférée par toutes les diversités, qu’aucune frontière n’est légitime à arrêter.
Mais voilà, le réel rattrape nos débats. Et pour cause. Au moment où l’Europe dominait le monde, par le fer autant que par ses innovations, où elle était le lieu d’élaboration et de diffusion de pensées nouvelles et émancipatrices, elle était aussi un lieu d’émigration. Elle a peuplé le monde. Encore en 1960, au moment des indépendances, elle demeurait deux fois plus peuplée que l’Afrique. Aujourd’hui, ce temps est passé. Sa puissance, économique comme démographique, s’est échappée au moment même où elle est confrontée à un désir d’Occident sans limite. Il en résulte qu’il n’y a jamais eu autant d’immigrés en Europe qu’aujourd’hui – de deux à six fois plus qu’en Asie, en Afrique ou en Amérique latine, en proportion de la population. C’est un fait que l’Europe est ouverte aux différences humaines, culturelles et cultuelles, alors que, dans le Sud, la tendance est à la fermeture, plus ou moins prononcée, à tous les genres de diversité.
L’Europe est accueillante, et cela se sait. Dans aucune autre zone du monde, l’hospitalité n’est si développée, même lorsque l’on a traversé les frontières de façon clandestine. En France, nous mettons à disposition de tout nouvel arrivant nombre de services publics, de l’école à la santé en passant par la sécurité, ou encore l’accès au logement social, afin de favoriser le regroupement familial. Cela sans mesurer si la personne a déjà contribué à l’effort collectif qui permet l’existence de ce bien-être. Et nous ouvrons largement notre nationalité, bien plus que d’autres pays d’Europe.
L’État social peut-il accueillir tous ceux qui y aspirent et donner droit à toute personne de s’installer où elle le souhaite, même lorsque sa situation ne relève pas d’un besoin de protection ? Est-il légitime de réguler les frontières par la contrainte ? Peut-on éluder qu’une part de l’immigration, souvent la moins qualifiée, aggrave des difficultés sociales qu’elle subit plus qu’elle n’en est responsable ? Peut-on fermer les yeux sur le fait qu’en France, selon l’Insee [Institut national de la statistique et des études économiques], le taux de pauvreté des immigrés est de 30,6 % et que les immigrés représentent 21 % des personnes pauvres – une réalité qui accentue la pression sur nombre de dispositifs sociaux ou des services publics ? Peut-on ignorer que ce taux de pauvreté pèse sur une offre de logement social insuffisante, sur des services de soins déjà sous tension et au sein d’écoles où la mixité des conditions fait défaut ?
Il est reproché à ceux qui se posent de telles questions de faire des immigrés les boucs émissaires de nos difficultés. De mauvaises pensées existent, et il faut les condamner. Mais cela ne peut constituer une excuse pour ne pas aborder la question sociale de l’immigration, comme le font une partie des populations résidant dans des zones protégées de la charge de l’accueil.
Comme argument suprême pour ne pas aborder frontalement la question de l’immigration, on nous répond que nous aurions besoin de bras afin de compenser notre hiver démographique. C’est en partie vrai. Tous les Etats membres de l’Union européenne sont en concurrence pour capter les travailleurs qualifiés de pays auxquels ils vont manquer. Cette captation est d’autant plus avantageuse, et injuste, que nous n’aurons pas supporté le poids des formations de ces ingénieurs, de ces médecins, etc. Une sorte de prédation de cerveaux, mâtinée de bons sentiments, est à l’œuvre avec un soutien patronal intéressé. Et il y a ceux, assignés aux métiers particulièrement pénibles, qui participent, malgré eux, surtout quand ils sont sans papiers, au démantèlement des statuts salariés dans le cadre d’une exploitation ubérisée.
Pourquoi éluder les difficultés de l’intégration ? Pourquoi ne pas combattre clairement des idéologies qui remettent en cause nos acquis sociétaux, qui animent des individus qui considèrent qu’en assassinant leur voisin, ou des juifs, ils iront au paradis ?
Se refuser à considérer les effets de l’anomie sociale qui rend plus difficile l’intégration, c’est mépriser ceux sur qui pèse le poids de l’accueil des immigrations, et consolider l’espace politique de ceux que l’on prétend combattre. Ignorer l’angoisse légitime des catégories populaires, pour qui l’Etat social est le bien le plus précieux – quand ce n’est pas le seul bien – et qui ont peur que la somme des pauvretés ne réduise la part de chacun, c’est ne pas comprendre l’attachement aux luttes qu’il a fallu mener pour que cet Etat existe.
La raison sensible des peuples leur dit que les migrations, issues des chaos du monde, peuvent déconstruire les sociabilités au profit de multitudes au sein desquelles le repli sur des communautés d’origines empêche toute convergence dans des causes communes leur permettant de continuer à faire peuple. Se refuser à comprendre ces inquiétudes, c’est se refuser à débattre de l’essentiel au mépris des plus démunis d’entre nous.

Boualem Sansal : Prix international de la Laïcité 2018.

Rappel de son intervention lors de la remise des prix 2018 :

« La laïcité est un chemin de liberté et de paix qui n’interdit ni la tradition ni la religion »

Madame le Maire de Paris
Mesdames et messieurs,

Je voudrais, si vous le permettez, me tourner en premier vers les membres du Jury du prix de la Laïcité, vers sa présidente, Madame Françoise Laborde et vers le président du Comité Laïcité et République, Monsieur Jean-Pierre Sakoun, pour les remercier du fond du cœur pour avoir fait de moi le lauréat 2018 du Prix international de la Laïcité et les assurer de ma profonde gratitude.

Je le sais, et j’en tire une fierté d’autant plus grande, votre geste dépasse ma personne : il honore et encourage toutes celles et tous ceux qui dans nos pays, l’Algérie, et le Maghreb plus largement, se battent durement pour faire avancer l’idée que la laïcité est un chemin de liberté et de paix, de progrès et d’ouverture, qui n’interdit ni la tradition ni la religion, au contraire, le respect qu’elle voue à toutes les croyances les protège également et leur ouvre au surplus des perspectives nouvelles d’épanouissement. Une croyance est d’autant plus forte et agissante qu’elle s’inscrit dans ce processus constant de connaissance de soi et d’ouverture sur les autres. Je vous remercie pour celles et ceux que vous honorez à travers moi et, auxquels croyez-moi je transmettrai votre message.

Je reviens vers vous tous, Mesdames et Messieurs, pour vous dire quelques mots sur la laïcité. Je ne suis pas particulièrement qualifié pour ce faire, étant né et vivant dans un pays qui ne connaît pas la laïcité, ni la démocratie, ni même le plus simple état de droit. J’en ai quand même une certaine connaissance que j’ai tirée de ma longue et attentive observation de la France et de sa fameuse laïcité, et que je voudrais tant voir se diffuser dans nos pays que la religion et la tradition gouvernent beaucoup trop étroitement pour les laisser entrevoir l’intérêt d’un peu de modernité pour améliorer leur quotidien et enrichir leurs aspirations.

J’ai aussi découvert, avec un regret certain, que la laïcité en France semblait ces derniers temps ne plus faire unité et unanimité comme elle l’a fait jusque-là. C’est un grand dommage. Ce serait la fin d’un grand rêve. La laïcité française serait l’objet de tentatives de révision diverses et variées toutes bien argumentées en première apparence, qui entendent l’inscrire dans une autre perspective, plus religieuse que civile. Ce qui peut se concevoir, pourquoi pas, rien n’est définitivement scellé. J’ai aussi entendu bien des gens, de plus en plus nombreux, dire qu’il serait bon que la France se dote d’une laïcité à la carte dans laquelle chaque religion puiserait ce qui lui convient. Ceci aussi peut se concevoir, pourquoi pas, il suffit d’accepter ce qui immanquablement en découlera, des conflits religieux en chaîne et une communautarisation totale de la société.

Le deuxième constat est que de tous côtés la France est sommée de renoncer à sa spécificité. Elle l’est par ceux des siens qui se reconnaissent maintenant une autre identité que française et elle l’est par les institutions internationales, comme la cour européenne de justice, la cour internationale de justice, par la commission des droits de l’homme de l’Onu, par la ligue islamique mondiale, et par des Etats prescripteurs tout-puissants que sont l’Arabie saoudite, le Qatar, l’Iran, e d’autres encore.

Au vu de cela, la question se pose : la France peut-elle vivre sans sa spécificité et sa laïcité ? A mon avis non, elle serait vite colonisée, elle doit donc les défendre avec force. C’est la mission que le CLR s’est donnée, mais comme on dit en Algérie, une main seule ne peut pas applaudir.

Merci au CLR, merci à son jury, merci à vous tous Mesdames et Messieurs.

Mon édito dans le bulletin de Réso de janvier 2024

La mort de Jacques Delors offre l’occasion de revenir sur la domination -que nous espérons temporaire- de l’ultralibéralisme qui dirige la vie économique et sociale de notre pays et de toute l’Europe occidentale depuis, au moins, Maastricht.

Au milieu des effarants hommages rendus à Delors, je retiens ces quelques lignes de notre amie et adhérente, Françoise Dal, ancienne conseillère régionale du Nord-Pas-de-Calais : « Martine Aubry a perdu son papa et, quel que soit son âge, c’est toujours très triste de perdre son père ; je lui adresse mes sincères condoléances. Jacques Delors a ouvert la parenthèse libérale du premier gouvernement Mauroy en 1983 : elle n’a jamais été refermée depuis. C’était un fédéraliste européen acharné qui a milité pour le oui à la Constitution européenne en 2005, reprise dans le traité d’Amsterdam voté par les parlementaires en 2007 alors que le peuple français l’avait largement rejetée. C’était un vrai libéral … à mes yeux pas un homme de gauche… »

Je parlais « d’effarants hommages ». En effet que dire de l’hommage national qu’a rendu Macron a celui qui est à la source, à la tête de la Commission des communautés européennes et en promulguant l’Acte unique en 1986, de l’ouverture des frontières et de la libre circulation des marchés et des  capitaux au sein d’une nouvelle Europe qui nie l’intérêt des Nations protectrices des Peuples. Il est, par cela, à l’origine de la désindustrialisation de notre pays et en conséquence, du déclassement des classes moyennes et de la paupérisation des classes populaires. Sa « victoire » se concrétisera, en 1992, par le traité de Maastricht qui fait de l’Europe une communauté supranationale niant la souveraineté des Peuples et ouvre la voie à la monnaie unique calquée sur le mark allemand.

On ne peut pas reprocher à Delors d’avoir été fidèle à lui-même ! Sa famille politique, c’est la démocratie chrétienne (à l’allemande ?). D’abord membre du MRP, il naviguera ensuite dans le marais du centre-gauche. Conseiller de Jacques Chaban-Delmas sous Georges Pompidou, il rejoindra la droite du PS aux côtés de Rocard. Il participera largement à l’échec de la gauche de ce parti et parviendra à convaincre Mitterrand de changer de politique et de se convertir à la rigueur économique en 1983.

Au fond, il ne faut pas s’étonner du vibrant éloge de Macron pour le fervent européïste : il en est son digne héritier. Mais, il n’est pas sûr que les salariés français apprécient « La libre circulation des personnes et des biens, des services et des capitaux, le marché unique » ou bien « l’euro dont il pose les bases », ou « la Banque centrale européenne » échappant au contrôle des Peuples mais pas aux intérêts du patronat. Ces mêmes salariés cherchent vainement « l’Europe du dialogue social réconciliant patronat et syndicat (!!!?). Toujours selon Macron, Jacques Delors aurait pris « contre l’inflation des mesures difficiles mais efficaces » comme la « fin de l’indexation des salaires sur les prix et des restrictions budgétaires ». Difficiles pour qui ? Efficaces pour quoi ? Il s’agirait là d’une « œuvre de réconciliation ». Réconcilier « la France (des privilégiés) avec l’Europe (libérale) » sans doute, les Français avec leurs dirigeants sans doute pas ! Quant à « l’Europe de la croissance et de la solidarité », on a beau savoir que, lors des hommages, on raconte n’importe quoi, là, on se demande sur quelle planète vit Macron.

Pas un mot sur nos usines délocalisées aux 4 coins du monde, pas un mot sur le démantèlement de nos services publics, pas un mot sur les salaires bloqués, pas un mot sur le droit du travail réduit, pas un mot sur le chômage de masse qui dure, pas un mot sur l’appauvrissement général de l’extrême majorité des Français et sur l’enrichissement des privilégiés au détriment de la richesse collective…

Ce qui est plus inquiétant, c’est le concert de louanges tenu par une partie du PS. Ont-ils oublié, ceux-ci, au nom d’une appartenance supposée à une bienheureuse Europe mythique, que Delors est un des principaux artisans de la conversion du PS au libéralisme sauvage et, par là-même, du discrédit dont ce parti est toujours l’objet dans une grande partie de l’électorat de gauche ? C’est sous l’impulsion du « delorisme » que le PS au pouvoir a dérégulé comme jamais dans son histoire et comme nulle part ailleurs ! Il n’y a plus de socialistes au PS -ils sont tous partis dans la nature ou, divisés, ont créé de petits partis- mais il y reste de vrais socio-démocrates. Il serait temps qu’ils se réveillent ; ils en avaient, en ordre dispersé, montré quelques signes, entre autres en évoquant la nécessité de tenir un bilan de la gauche au pouvoir. Ceci aurait entrainé une analyse salutaire de l’européïsme béat qui a envahi les esprits. Hélas, on peut craindre, quand, par exemple, on envisage le recours à Glucksman comme tête de liste à l’élection européenne, que ce soit les socio-libéraux qui relèvent à nouveau la tête…

Pendant ce temps, au moment où j’écris ces lignes, Macron pense à remanier son gouvernement. Avec Borne ou sans Borne, that is the question. Question dont, comme la majorité des Français, je me moque : quel que soit le locataire de Matignon -les paris donnent Attal-, Macron ne changera pas sa politique.

En ce début d’année, je nous souhaite un grand mouvement républicain social et laïque, un pays mobilisé non seulement pour empêcher Macron de détruire plus encore les acquis dont nos anciens sont à l’origine mais aussi pour reconstruire cette gauche absente et dont nous avons tant besoin.

Bonne année, militante donc, à chacun de vous.

Mon édito dans le bulletin Réso de décembre 2023

Nous arrivons au terme d’une année qui aura été bien difficile pour les salariés et tous ceux qui vivent de leur travail.

Comment ne pas commencer par rappeler les grandes mobilisations contre le saccage de nos retraites ? La « réforme » Macron sert d’abord le profit immédiat du patronat qui depuis longtemps veut la suppression de cette part de nos salaires qui, depuis l’après-guerre, finance notre protection sociale ; cette « réforme » sert ensuite le profit futur des sociétés financières qui proposeront, à ceux qui seront en mesure de se les offrir ou qui s’y contraindront pour ne pas risquer de tomber dans la misère, des produits assurantiels remplaçant la Sécu. Le peuple français ne s’y est pas trompé ; il s’est levé en masse contre cette infâmie. Il y a bien longtemps que la France ne s’était pas couverte, de Paris aux sous-préfectures, d’immenses cortèges chaque semaine renouvelés.

L’occasion de remettre quelques chiffres en mémoire : les 500 plus grosses fortunes françaises ont vu leur richesse augmenter de 30% en un an, soit 1000 milliards ; les 40 plus grosses sociétés du CAC 40 ont distribué un record de 80 milliards de dividendes à leurs actionnaires l’année précédente ; les revenus financiers représentent 385 milliards annuels qui ne cotisent pas pour les caisses de retraite. Faire cotiser les revenus financiers au même taux que les salaires (11%), rapporterait 40 milliards ! Faire contribuer 2% des 1000 milliards des plus grosses fortunes rapporterait 20 milliards. Cela n’a, évidemment, pas été le choix des libéraux qui nous gouvernent. Pour combler un prétendu « trou » des caisses de retraites qui n’existe pas (cf nos numéros de début d’année), ils ont préféré reculer l’âge de la retraite à 64 ans. Lire la suite de ‘Mon édito dans le bulletin Réso de décembre 2023′

La situation au Proche-Orient

Comment sortir de cette situation de guerre perpétuelle ? Entre les islamo-fachistes du Hamas et la droite extrême et colonialiste israëlienne, trouver une voie pour la solution à 2 états.

Un texte de Christian Picquet.

http://christian-picquet.fr/2023/11/13/oui-deux-etats-pour-la-palestine/

Mon édito dans le Réso de novembre 2023

Certes, la situation au Proche-Orient qui risque d’embraser au-delà de la Palestine, occupe nos pensées d’autant plus qu’elle fige chacun sur ses soutiens alors que la recherche d’une solution de paix juste exigerait de s’attacher à la Raison et à la diplomatie (quelle perte que la disparition de la voix de la France…) et d’apporter un soutien sans faille à ceux qui, de part et d’autre -et même si, aujourd’hui, ils sont peu nombreux- recherchent une voie de paix.

Cependant, on ne doit pas se laisser détourner du fait, qu’en France, Macron continue de mener une guerre sociale sans merci contre le monde du travail qui a entrainé la révolte populaire des gilets jaunes fin 2018 -et cette blessure n’est pas refermée- et le formidable mouvement contre la réforme des retraites de janvier à mai de cette année -qui a démontré l’ampleur du rejet de ce pouvoir. Malgré cela, le gouvernement libéral de Macron continue d’éclater notre société, de brader emploi et industrie, de détruire nos services publics, de s’en prendre à tous nos systèmes de solidarité -et au 1er rang à la sécurité sociale.

Le vote du budget de la Sécu démontre que le gouvernement n’a pas changé depuis les grandes mobilisations contre la casse des retraites. La même politique libérale comme les mêmes méthodes anti-démocratiques sont à l’œuvre. Lire la suite de ‘Mon édito dans le Réso de novembre 2023′

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